mercredi 26 novembre 2014

Accueil versus production

J'arrive dans une boutique Mister Minit pour récupérer des chaussures que j'ai fait ressemeler. Devant moi, une autre cliente attend. L'employé est seul. Il est en train de travailler sur une chaussure. Il se tourne légèrement vers nous, pour vérifier s'il y a des clients qui attendent et retourne à son ouvrage. Il prend une autre chaussure et continue son travail. L'autre cliente se tourne vers moi, excédée : « C'est toujours comme ça. »

Oui, en France, c'est toujours comme ça, avec les employés qui n'ont pas compris qu'ils ne sont pas seulement des producteurs, mais aussi des accueillants. Une étude* a montré que la durée de l'attente à un impact négatif sur l'évaluation du service.

La chaussure ne pouvait-elle pas attendre ? L'employé a-t-il été recruté également pour ses qualités d'accueil ? A-t-il été formé à la relation interpersonnelle ou seulement à la cordonnerie et la serrurerie ?

Si j'en crois les informations sur le site Web Mister Minit, pour travailler chez eux, il faut être manuel, habile de ses mains, souriant, aimer le travail en équipe et disposer d'une réelle motivation pour la vente. Le sourire ne suffit pas. Une véritable « orientation client » doit exister et être testé dès le recrutement.

* Taylor Shirley. Waiting for service: The relationship between delays and evaluations of service. Journal of Marketing, 1994, Vol. 58, n° 2, p56-69.

mercredi 17 septembre 2014

Les nouvelles technologies pour mieux accueillir les touristes ? Un leurre

La nouvelle maire de Paris a affirmé, rapporte Localtis.info, que « c'est le rôle de Paris d'investir dans les nouvelles technologies pour mieux accueillir les touristes. Paris doit aider toutes celles et ceux qui portent des initiatives et aider la nouvelle économie à prospérer pour faire le Paris du numérique. »

C'est un leurre. Les nouvelles technologies ne permettent pas de mieux accueillir pas plus qu'elles ne rendent plus heureux. L'accueil est une situation de communication interpersonnelle. Dans le cadre du tourisme, c'est un prestataire de service face à un ou plusieurs touristes, mais pas à distance (sauf dans le cas d'une conversation téléphonique). Les nouvelles technologies peuvent améliorer le service, par exemple en accélérant les procédures administratives. Mais elles sont souvent utilisées pour diminuer le nombre d'accueillants, voire les supprimer.

jeudi 21 août 2014

Améliorer l'accueil grâce aux médias sociaux ? Un leurre

Dans un article du journal L'Hôtellerie Restauration, un professionnel se désole que, selon une étude auprès de voyageurs, trois villes françaises soient classées parmi les cinq plus détestées au monde. Il propose d'utiliser TripAdvisor, YouTube et les médias sociaux pour améliorer la situation. Quelle curieuse idée. Il suffirait de mieux communiquer sur les destinations pour améliorer l'accueil. Cela me fait penser aux politiques qui, devant la fronde de l'opinion publique face à une réforme, expliquent qu'ils ont mal communiqué sur celle-ci.

Pour améliorer l’accueil, il faut agir sur l’humain : recrutement, formation, management et motivation. Ce n’est pas aux pouvoirs publics ou aux syndicats professionnels d’agir, mais à chaque établissement et chaque responsable de personnes en contact. Vaste programme !

jeudi 14 août 2014

Surtout, ne pas toucher le client

À la caisse d'une grande surface de bricolage où j'étais déjà venu la veille. La caissière est la même. Je l'observe attentivement. Aucun sourire. Vocabulaire minimum ("Bonjour", "Au revoir", "Merci") et une voix quasi inaudible. Je remarque que, même si les clients tendent la main pour récupérer leurs tickets de caisse et de carte bleue, elle le pose sur sa caisse à un endroit précis.

Lorsque que vient mon tour, je pose la main sur la caisse à l'endroit que j'ai repéré. Que croyez-vous qu'il arriva ? Elle posa les tickets à côté de ma main.

Cette caissière semble ne vouloir avoir aucun contact physique avec ses clients. Elle rêve de travailler derrière une vitre blindée ou – mieux encore – en back office, loin des clients.

Pourtant, comme le rapporte Guéguen (2005, p. 208 s.)*, le contact tactile, augmente la confiance du client.

Guéguen Nicolas. 100 petites expériences en psychologie du consommateur, Paris : Dunod, 2005

lundi 4 août 2014

Mais qui s’occupe de l’accueil et du service ?

Le numéro du 2 mai 2014 du journal L’Hôtellerie Restauration est consacré à la présentation des 64 nouveaux étoilés Michelin. J’ai mené une analyse du contenu des articles. On y trouve la présentation du parcours du chef, sa « philosophie » culinaire et son ressenti à l’annonce de la nouvelle étoile. Mais presque rien concernant l’accueil et le service. Le nom du responsable de la salle n’est précisé que dans 30 % des articles. Le conjoint ou un associé est évoqué dans 23 % des cas, sans que l’on sache explicitement s’il participe au service.


Il est étonnant, dans un journal qui se lamente régulièrement du peu d’attirance des jeunes pour les métiers de la salle, que l’accueil et le service soit ainsi oubliés. On dirait que ces nouveaux restaurants étoilés sont des cafétérias où le client vient se servir directement en cuisine. Une fois de plus, je constate que l’accueil et le service ne sont pas valorisés en France. Et ce n’est pas près de changer.

dimanche 27 juillet 2014

Accueillir : savoir-être ou savoir-faire ?

Un récent ouvrage de Jean-Michel Roche, Oral ô désespoir ! (éditions L’Harmattan), aborde la faiblesse des Français en matière de communication interpersonnelle. Elle serait liée à notre héritage judéo-chrétien et à l’absence de formation, dès le collège.

Ce livre traite surtout de la prise de parole en public et moins de l’accueil ou de la négociation commerciale. Il prend le plus souvent comme exemple des hommes politiques. L’auteur insiste sur l’apparence, le regard, la gestuelle, l’absence auto-contact, le silence et le sourire.

Bien sûr, cet ouvrage, qui ressemble souvent à une brochure publicitaire pour l’entreprise de formation créée par Jean-Michel Roche, ne révèle pas comment former à la communication. Il propose un constat, pas une boîte à outils. Mais il montre clairement que la communication interpersonnelle, ce sont d’abord des techniques, donc des savoir-faire et non pas des savoir-être liés à la personnalité des individus. Il existe bien des techniques d’accueil. 

Différence entre accueil et service

Une expérience dans un restaurant dans une zone de loisirs me permet d’illustrer une fois encore la différence entre accueil et service.

Nous étions cinq à table. Nous avons commandé deux entrées et cinq plats. Une première entrée arrive pour moi. Je la finis. La seconde entrée n’arrive toujours pas. Nous le faisons remarquer. La serveuse nous indique très gentiment qu’elle va voir. Arrive alors un plat (et non pas une entrée) que nous n’avons pas commandé. Nous le refusons. Trois plats de résistance nous sont servis… et toujours pas d’entrée. Finalement, on nous apporte à nouveau… le plat que nous avons refusé ! Un manque de professionnalisme évident. Le restaurant semble avoir été repris récemment. Par des amateurs, sans doute.

Mais tout cela s’est déroulé dans une très bonne ambiance. Le patron et sa fille (?) étaient vraiment charmants. Ils nous ont demandé si tout allait bien. Ils ne comptent pas leurs sourires.

Un service déplorable donc, mais un accueil parfait.

lundi 21 juillet 2014

Accueil et autocritique

Un restaurant du Cap Ferret a obtenu la condamnation d'une blogueuse à 1 500 euros de dommages et intérêts. Notre propos ne concerne pas le litige entre la restauratrice et la blogueuse.

Même si l'article a été retiré du blog, il est toujours disponible ici. Sa lecture est très instructive sur les pratiques de mauvais accueil : agressivité, jérémiades, manque d'empathie, absence d'autocritique, refus de compensation. Sans parler de la médiocre qualité de service.

Le web (blog, sites web participatif) est une source d'informations formidable pour les clients. De nombreux professionnels rêvent de revenir en arrière, avant le développement de l'Internet, lorsque quelques guides gastronomiques faisaient la pluie et le beau temps pour la restauration haut de gamme et, pour les autres établissements, le client ne disposait presque d'aucune information sinon d'un hypothétique bouche-à-oreille. Mais le dentifrice ne peux pas être remis dans le tube. Il ne s'agit pas de « faire avec ». Il faut utiliser l'Internet pour s'autocritiquer. Au lieu d'attaquer en justice, la restauratrice aurait mieux fait de se remettre en cause.

mardi 1 juillet 2014

Améliorer l'accueil en France par une campagne de communication ?

L'Institut Montaigne et de la CCI de Paris, viennent de publier un rapport concernant l'avenir du tourisme en France. Pour améliorer l'accueil, les auteurs proposent de développer une culture de service et favoriser le changement d’état d’esprit vis-à-vis du service au travers, par exemple :

  • d’une grande campagne nationale sur l’importance du tourisme dans notre économie et l’implication nécessaire de tous pour en faire un de nos atouts clés et créer de l’emploi 
  • d'une série télévisée ou programme de télé-réalité autour de l’hôtellerie par exemple (à l’image de TopChef) pour générer des vocations et valoriser l’image de ces métiers.

Une campagne d'affichage a été lancée en Guadeloupe, avec le slogan «  L'avenir, c'est le tourisme. C'est nous »,  pour faire prendre conscience à la population locale de l'importance économique du tourisme. Les résultats n'ont pas été la hauteur, sauf erreur de ma part. Ce genre d'action ne permet que de faire travailler les agences de communication. Pour changer le rapport au service et à l'accueil des Français, il faut changer les mentalités. Vaste programme !

dimanche 1 juin 2014

4 sourires avant de partir

Après un repas dans un restaurant japonais – tenu par des Vietnamiens, bien sûr – je règle l'addition et me dirige vers la sortie. Sur mon chemin, j'ai rencontré quatre serveuses. Toutes m'ont remercié et salué. Une dernière impression formidable.

Le restaurant n'est ouvert que depuis un mois. Les personnels en contact ont-ils reçu des consignes en matière d'accueil ? Je le pense. Elles les ont en tout cas appliquées à la lettre. En sera-t-il toujours ainsi dans quelques mois ? Je retournerai dans ce restaurant, uniquement pour le vérifier.

vendredi 23 mai 2014

Ne pas attendre de remerciements

Expérience vécue : j'ai réservé depuis plus d'un mois une chambre dans un hôtel du centre ville d'Aix-en-Provence, à 100 m. de l'endroit où je dois participer à une conférence.

À mon arrivée, j'apprends que l'hôtel ne peut pas me recevoir à cause d'un problème technique dans la chambre prévue. Un courriel m'a été envoyé le matin. On a tenté de me prévenir par un appel sur mon téléphone fixe. Mais j'étais en route pour Aix et n'ai rien reçu. J'exige donc que l'on me trouve un autre hôtel. Après de nombreux coups de téléphone, l'hôtelier trouve une chambre dans la périphérie, loin du centre ville. Il m'y emmène dans sa voiture et m'invite à prendre le taxi, le lendemain, pour me rendre à ma conférence. Il me remboursera.

Après avoir beaucoup marché, la veille au soir, pour trouver un restaurant, je me présente le matin à l'hôtel pour me faire rembourser le taxi. L'hôtelier s'étonne que je ne le remercie pas pour tout ce qu'il a fait pour moi. Je devrais le remercier parce qu'il m'a expédié hors de la ville, m'a permis d'avoir des ampoules aux pieds et de payer la chambre 4 euros de plus que dans son hôtel !

De toute façon, un accueillant ne doit pas espérer de remerciements. Quand il en reçoit, il doit s'en réjouir, mais l'ingratitude est le lot du client. Il faut faire avec.

mercredi 7 mai 2014

Connexion à défaut de disponibilité immédiate

Dix heures, dans un bar d'hôtel en Espagne. Je m'approche du comptoir pour obtenir un cafe solo. La serveuse est en train de couper des citrons, sans doute pour les cocktails. Elle me voit. Pas un signe de sa part. Elle se retourne et part dans l'office chercher je ne sais quoi. J'attendrai finalement une minute avant qu'elle m'adresse la parole et me demande, de loin, ce que je veux. Le tout sans sourire et avec l'air de ne pas supporter ces clients qui ont la mauvaise idée de vouloir commander.

Bien sûr, son chef de service n'a rien vu. Bien sûr, elle ne risque aucune sanction. Mais cette serveuse est-elle vraiment faite pour un métier de contact ?

Un simple signe de sa part signifiant « Bonjour. Je vous ai vu. Je suis à vous dans un instant. » ne lui aurait rien coûté et m'aurait mis en connexion avec elle. La disponibilité immédiate n'est pas toujours possible pour les accueillants. Mais ils doivent rapidement chercher à se connecter avec leurs futurs interlocuteurs. Cela permet de faire patienter ceux-ci et de les mettre dans un état d'esprit positif.


vendredi 18 avril 2014

Scène et coulisse

Dans une grande surface de bricolage, j'arrive à une caisse. De toute évidence la caissière aussi. Elle prend son service. Sans jamais me regarder, elle installe (assez rapidement) sa caisse.

Survient un collègue de la sécurité, tout sourire : « Salut, Kitty. Tu vas bien ? » La caissière se retourne vers lui. Et patati et patata. Je n'existe pas.

J'ai eu le temps de poser l'article à payer sur le tapis et de passer du côté où l'on règle. J'écoute la conversation. Je regarde intensément les deux personnes. Finalement, la caissière se met au travail et me gratifie d'un « Bonjour » triste et machinal.

Pour les employés en contact, il y a deux vies : celle avec les clients (sur la scène) et celle avec les collègues (en coulisses). Laquelle préfèrent-ils, à votre avis ? Pourquoi l'une empiète-t-elle sur l'autre ? Quel manager sanctionnera enfin ce type de comportement ?